dimanche 5 octobre 2008

L'écriture, qu'est-ce que c'est?

Autant commencer par se présenter.  Je suis écrivain, et je suis journaliste. Comme les hasards de la vie font que j'ai un jour travaillé à la télévision, je me suis intéressée tôt à l'image et ayant appris le métier sur le tas (souvent à la dure), je suis devenue réalisatrice de films. Personnellement je ne fais pas vraiment de différence entre tous ces moyens d'expression. 
Est-ce de la peinture? Du vandalisme? De l'écriture? 
Questions futiles, c'est intéressant. Cela vient d'un mur de Rome.

Pour bien d'autres, par contre, ces distinctions sont essentielles, et à franchement parler, c'est là quelque chose qui m'a toujours étonnée.
Personnellement, j'ai toujours mis autant de soin à écrire un article ou le texte d'un sujet TV d'actualité qu'un texte littéraire, et par ailleurs je considère que ce sont les monteurs et monteuses des sujets d'actualité TV qui m'ont fait comprendre comment raconter une histoire, qu'elle dure 90 secondes (moyenne pour un sujet d'actualité TV) ou cinq cents pages (la taille des romans les plus longs que j'ai écrits ( Le Trajet d'une rivière et Zaïda).
Pour moi, écrire, c'est écrire - vérité de La Palice... Quelle importance que ce soit pour parler de chapeaux, de politique, de grands sentiments, de héros littéraires, etc., etc…?

Et ça? Un bistrot romain déclare être contre la guerre et contre le menu touristique (on vous offre le plat du jour et vous pouvez demander des variations - autrement dit on est contre le préconçu). Un bistrot peut-il se mêler de politique? Doit-il afficher autre chose qu'un menu standard?

Mais je suis très souvent confrontée à une catégorisation qui s'apparente à de la discrimination. Ainsi, le roman historique est considéré comme un genre mineur - alors qu'un roman historique bien recherché est une manière merveilleuse d'approcher l'Histoire. Qui plus est le roman historique fonctionne souvent autrement que les livres d'histoire, qui découpent les événements en tranches, et ne vous donnent guère de vue d'ensemble de la marche du monde. Le roman policier est également considéré comme de la sous-littérature, alors que pour moi, c'est le genre majeur de notre époque: à la fois tragédie grecque, roman social, reflet précis des problèmes de notre temps, source de vivacité pour la langue (pensez aux vingt mille néologismes de San Antonio!).
J'ai toujours pensé que le découpage de la littérature en genres majeurs et mineurs était une absurdité - c'est d'ailleurs une idée qui ne me serait jamais venue, pour moi un livre que j'aime est majeur, qu'il s'agisse de recettes de cuisine ou, mettons, des Mandarins de Simone de Beauvoir. Je ne fais pas cette distinction-là. Mais il a bien fallu que je prenne conscience du fait que les autres la font, ne serait-ce que la fois où on m'a expliqué qu'on ne m'avait pas invitée à un colloque littéraire parce qu'il était réservé aux écrivains et que j'étais journaliste. Ou en lisant à propos d'un de mes romans historiques, Le Maître de Garamond, pour lequel il a fallu que je pioche pendant près de quatre ans la littérature du XVIe siècle, que c'était pas mal, EN DEPIT du fait que ce n'était QU'un roman historique.
La futilité des classifications se retrouve dans les films. Je n'entrerai pas dans les détails pour ne pas me répéter.
En ce qui me concerne, j'essaie d'oublier ces frontières: elles me semblent contenir en germe tous les préjudices et toutes les discriminations: classes sociales,  nationalités, races… Cette manière de mettre les choses et les gens dans des cases exprime, me semble-t-il, une arrogance (il y a nous, et tous les autres sont indignes de nous, “mineurs”) qui mène aux pires dérives.
Bon, voilà, j'ai posé mes cartes sur la table. 
A partir d'ici, on parlera de choses et d'autres - y compris d'écriture. Mais comme dans le cas particulier tout passe par l'écrit - j'ai appelé mon blog ECRITURE.
Ah, encore une chose: il se pourrait que, de temps à autre, les sujets virent à l'anglais. Je sais que les francophones pensent souvent que l'anglais est une langue trop envahissante, à ignorer.  Je n'ai pas ce genre de problème. J'essaie d'écrire le français le plus correct possible, mais je cultive mon anglais - cela donne accès au monde, et je trouverais idiot de m'en priver.

Robert, tu me manques! Ne m'oublie pas! Lettre majeure? Graffiti mineur? 
On pourrait se poser ce genre de questions à l'infini. 

5 commentaires:

Caplan a dit…

Yaisse! Premier commentaire!

Bravo pour ce blog! Je me réjouis beaucoup de voir toutes tes découvertes et de lire tes messages.

Bon vent!

T a dit…

Ahahahah... Anne fait son blog! Décidément, on n'est plus beaucoup à ne pas avoir de blog...

T

Unknown a dit…

Un nouveau blog qui fera partie de mes favoris, Anne.

Amicalement

Vianney

dbregnard a dit…

Ca démarre pourtant haut et fort, pour quelqu'un qui n'a pas les ressources intellectuelles de Le Clézio!!!
J'aime ce ton, j'aime ces appels à la réflexion. J'aime ce combat qui est le vôtre, moi qui n'ai de loin pas vos ressources intellectuelles ni votre force de travail.

Signé: un transfuge de cuk.ch, qui n'en peut plus de cette dérive tout à l'iPhone (hihihi)

Anonyme a dit…

Je suis d'accord avec toi en ce qui concerne les à priori générés par les étiquettes, c'est toujours réducteur, et l'attribution d'une étiquette c'est un peu comme se poser des œillères.

J'ai quelques bases en littérature "classique", mais j'adore la littérature d'anticipation et fantastique, celle ci étant considérée comme mineure, certains auteurs peuvent se permettre d'aborder des sujets originaux qu'il serait difficile de développer en littérature plus "classique". Comme tu le dis, je ne trouve pas que le roman historique soit de la littérature au rabais, il permet d'appréhender un moment de l'histoire avec beaucoup plus de profondeur qu'une énumération sèche de faits historiques, l'enrichissant par l'évocation des modes de vie de l'époque (ce qui doit demander pas mal de travail de recherche), de plus le roman historique nous permet de relativiser notre vision des choses, un fait donné n'ayant pas la même signification selon l'époque ou le lieu.

Pour ce qui est des sujets abordés et de l'usage de l'anglais, tu es chez toi, tu fais ce que tu veux, c'est à nous d'essuyer nos chaussures… à moins que tu préfères que nous les enlevions.